Ports et caves d'Orival
La petite ville d’Orival, bloquée entre la forêt la Londe Rouvray et la Seine, a eu dans le passé deux ports répertoriés sur le cadastre.
Ces ports étaient sûrement plus des accès à la Seine avec un débarcadère que de véritables ports.
Historiquement, la présence de tessons d’amphores sur l’oppidum d’Orival qui surplombe le village montre des échanges commerciaux dès l’époque gallo-romaine utilisant sûrement la Seine. Au Moyen- Âge, vers 1260, on sait qu’une pêcherie est autorisée à Orival et que vers 1631 et 1675 on compte des charpentiers de bateaux parmi la population. Mais nous verrons plus loin que la présence de ces ports avait une raison plus mercantile.
Le port Dufour se situait en amont du pont de chemin de fer ; à peu près au niveau de l’actuelle boulangerie.
L’ancienne carte postale ci-dessous a été prise approximativement de ce lieu.
Le nom de port Dufour ou port du four apparaît sur les cadastres dès 1807.
Il y avait à cet endroit un passage à bateaux pour traverser la Seine entre Orival et St Aubin les Elbeuf.
D’après les écrits de Saint Denis en 1893, on sait qu’un certain Nicolas Letellier fait creuser à partir de 1765 des cavités dans la falaise pour stocker des marchandises. Ce qui prouve un certain trafic.
On peut encore en voir quelques entrées au fond des propriétés qui longent la route vers Elbeuf. Il y avait une dizaine de cavités à cet endroit.
Quelques-unes de ces cavités ont été détruites suite aux bombardements de Mai 1944 qui visaient surtout à détruire le pont. La falaise a été purgée des risques d’éboulements en 1946.
Certains de ces entrepôts ont été topographiés en 2016 (voir bibliographie), l’un contenait les restes d’un pressoir à cidre.
Le nom de Port du Gravier apparaît dans des archives dès 1241, mais bizarrement disparait du cadastre en 1807 pour réapparaître sur celui de 1832.
Il se trouvait en aval du pont au niveau de la plage actuelle.
Le quartier du gravier a presque été totalement détruit par les bombardements alliés qui visaient le pont.
Mais on retrouve en face de la plage actuelle le nom d’une place et d’une impasse rappelant l’ancien quartier du Gravier.
Quatorze cavités, dont huit figurent sur le plan cadastral de 1832, se trouvent à environ 300 m de la descente vers la Seine. La plupart de ces entrepôts ont été creusés pour stocker des marchandises.
Dans les archives, on retrouve des notes de 1760 et 1767 qui confirment le passage de vin entre le port de Couronne et celui d’Orival par voie terrestre. Le stockage était fait dans des caves creusées dans la falaise en attendant la réexpédition par la Seine vers les communes jusqu’à Paris.
Ce trajet à travers la forêt permettait de supprimer les taxes que le port de Rouen prenait sur le débarquement des marchandises. Bien sûr, les marchands de Rouen se sont opposés à cette concurrence. Ainsi, dès 1706, un texte réclame que les taxes appliquées par la ville de Rouen soient appliquées à Orival, semble-t-il sans succès. Une taxe d’amarrage est décidée en 1893, mais le chemin de fer et la guerre auront raison des activités portuaires d’Orival.
On peut encore voir au fond de certaines propriétés privées qui longent la route des entrées de ces entrepôts creusés dans la falaise.
La plus belle, avec une entrée stylisée, se trouve au fond d’une belle propriété appelée « le château » par les habitants du quartier.
La topographie de cet entrepôt est intéressante.
On voit qu’il y a eu un premier creusement rectangulaire pour servir d’entrepôt.
Ensuite deux boyaux ont été ajoutés au fond. Ces derniers travaux ont été entrepris par les Allemands pendant la seconde guerre mondiale. Ils ont utilisé des trépans et de l’explosif pour essayer de créer un réseau de passage sécurisé entre plusieurs cavités qu’ils avaient réquisitionnés. Comme le montre le dessin ci-dessous.
Ainsi un dortoir a été installé dans une autre cavité au niveau d’une barrière qui leur permettait de loger les soldats dont la mission était de filtrer le passage sur la route de Oissel-Elbeuf.
D’après le témoignage d’habitants, la barrière se situait au niveau du passage piéton actuel. Leur position servait aussi à surveiller le pont qui était un passage stratégique de la Seine.
Pendant les bombardements alliés, de nombreux Orivalais se sont réfugiés dans ces caves qui leur ont servi d’abris.
Sans aucun rapport avec les ports et les caves troglodytes d’Orival, il existe un autre vestige plus ancien appelé la « chapelle aux anglais » qui se trouve sur la route vers Elbeuf, avant l’église St Georges (lien vers la page consacrée à l’église St Georges:L' église St Georges à Orival ).
Cette entaille rectangulaire dans la falaise serait l’emplacement d’un ancien temple gallo-romain peut-être dédié à Jupiter.
Le sommet des piliers devait à l’origine être sculpté.
Voici une ancienne carte postale qui illustre ce lieu particulier.
On a retrouvé au pied de l’édifice la tête d’une statue qui n’a pas pu être identifiée, mais qui date de cette époque. Elle se trouve au musée des savoirs à Elbeuf.
Ensuite, on a « rechristianisé » le lieu et une vierge a été installée au pied de l’édifice dans une petite niche.
BIBLIOGRAPHIE :
Staigre J.-CL.,Audam J.-L.,Sayaret D. (2019). Patrimoine souterrain et géologique de la région d’Elbeuf (Seine normande). Spéléo-Drack, 23, 376 p.
Staigre Jean-Claude & Mouchel Jérome (2013) Les caves abris du Gravier (Orival, Seine -Maritime). Spéléo-Drack ,20,54p.
Le musée de la Fabrique des savoirs à Elbeuf.
Les Archives départementales,
Géoportail
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