La poterie en forêt la Londe Rouvray

Il a été trouvé des poteries datant de l’époque gallo-romaine et même de l’âge du bronze sur plusieurs sites dans la forêt la Londe Rouvray. On peut donc supposer que des artisans potiers locaux permettaient de subvenir aux besoins des habitants alentours.

Un grand atelier de poterie :

Des prospections en 1985 et des fouilles de 1987 à 1991 dirigées par Nathalie Roy ont permis de découvrir en pleine forêt un site de fabrication de poteries à plus grande échelle.

Carte des fouilles r

 

D’après les informations des rapports de fouilles sur le sujet et le recoupement d’un témoignage les ayant vu ; le site se trouvait au niveau des parcelles forestières 415 et 416 près de la Brèche aux Loups (coordonnées Lambert I : 1181.98*495.90 équivalents environ à GPS : 49.33 N/ 0,90E).

Sur un versant les archéologues ont découvert 3 fours de type traditionnel, circulaire, à tirage vertical et à sole suspendue.

Ci-dessous une maquette et croquis qui donne une idée de la fabrication de ce type de four.

Restitution de four

Croquis de four

 

Un 4ème four plus petit était sous l’un des trois principaux. Preuve que le site a donc perduré et évolué.

Autour de ceux-ci ont été recueillies plus de 4 tonnes de céramiques pendant la durée des fouilles. Cette découverte importante montre l’importance du site et surtout cela a permis d’avoir une idée de datation.

Cet atelier de potier aurait été exploité au début du VIII° siècle (entre 700 et 750 Ap J.C). (Pour ceux qui aiment les détails historiques cela correspond à la fin de l’époque mérovingienne et le début du Carolingien).

Sur l’autre versant de la brèche, il y a eu des aménagements pour installer des bâtiments. Dont un , d’environ 4.5m sur 6m, avec des soubassements en silex, servait d’atelier de tournage. Deux autres appentis étaient utilisés comme séchoirs. Un peu plus loin d’autres structures servaient probablement à l’habitat des potiers (foyer, fosses …)

Terrasse

 

La production de poteries du site est uniquement à usage domestique. Elles sont souvent à pâte blanche fine et décorée. Ces décors sont effectués avec une molette ou un poinçon ou par des bandes de terre rapportées. Par contre aucune poterie peinte ou glaçurée n’a été retrouvée.

Fragment de jatte

Col de cruche

 

Dans les formes les plus retrouvées il y a les cruches et les formes bouteilles typiques de l’époque concernée.

Poteries

Oules bouteilles

 

D’autres en forme de bol rappellent plus les techniques gallo-romaines.

Des mortiers et des passoires ont même été retrouvés.

Mortiers

Mortiers

PassoiresPassoires

 

La diffusion de la production de ce site a été importante car on retrouve ces poteries à Rouen, le long de la vallée de la Seine (des pièces ont été découvertes à St Martin de Boscherville), mais aussi en Angleterre à Hamwic qui est le port de la ville actuelle de Southampton.

Le choix du site pour cette production à assez grande échelle n’a rien d’étonnant : il se trouve à 200m d’une importante voie antique qui allait vers Rouen au Nord.

Bien sûr la forêt fournissait le bois pour les fours. Mais la terre aux alentours est aussi connue pour avoir alimenté les potiers de la région.

Des prospections autour du site ont permis la découverte de céramiques des époques gallo-romaines et du début du Moyen Age. Ce qui prouve que ce site a été occupé pendant plusieurs siècles.

 

 

Les carrières des terres à pots :

Comme évoqué plus haut il y a plusieurs endroits dans la forêt qui étaient connus des potiers pour la qualité de l’argile pouvant être recueillie.

Un lieu en particulier a été exploité jusqu’en 1964. Il s’agit « des carrières de la terre à pots ».

Carte terre a pots r

 

Les carrières n’étant plus exploitées, l’eau les a remplis et la végétation commence à reprendre ses droits.

Carriere 1 r 1

Etang N°1

Seul l’étang accessible par le chemin forestier d’Argillières est autorisé.  GPS : 49.32898N / 0.853598E.

Les deux autres sont sur un domaine privé de chasse. L’accès y est normalement interdit et surtout dangereux pendant la période de chasse.  

  Carriere 2 r 1  Carriere 3 r

                                  Carrière N°2                                                                  Carrière N°3

Dés 1402 on retrouve dans « le coutumier de Normandie » que les francs usagers de la forêt de Londe avaient l’autorisation de prélever l’argile. Ceci était généralement lié à la présence de potiers aux alentours.

Plusieurs types d’argile reconnaissables à leur couleur (grise, noire…) étaient exploités suivant l’utilisation souhaitée.

L’argile était d’abord extraite en creusant des puits verticaux et pouvait être utilisée par des potiers locaux vers Infreville.

Poterie infreville r

Exemples de poterie commune produite à Infreville.

Des fontaines et un couvercle de fonds baptismaux dans une église font partie des plus belles pièces produites localement.

 Fontaine r  Fonts baptismaux r 1

 

Ces poteries sont de type « biscuit blanc » mais elles sont vernissées au plomb ce qui donne une teinte jaune orangée avec des marbrures brun violet dues au manganèse ajouté à la cuisson.

 Des faïenceries du Havre et de Rouen exploitent aussi l’argile noire qui permet d’avoir de la faïence blanche à la cuisson. Dés 1806 on recherche au niveau national ce type de gisement pour concurrencer les pièces anglaises.

La concurrence de ces grosses faïenceries est trop dure pour les petits artisans locaux qui dés 1860 se reconvertissent dans la fabrication de briques.

Dés 1901 les carrières sont cédées en concession pour une fabrique de Choisy le Roi. Les ouvriers travaillent maintenant à ciel ouvert.

Carriere avant 1918 r

 

Jusqu’en 1938 la carrière tourne à plein régime avec des wagonnets tirés par des treuils.

Carriere et wagonets r

Aiguillage r

 

2000 tonnes d’argile étaient exportées du site chaque année.

Comme le montre cette ancienne photo les carreaux blancs en faïence du métro parisien ont été fabriqués avec l’argile des carrières de la terre à pot.

Faience metro r

 

Après la guerre et jusqu’en 1950 une société des Vosges reprend l’activité qui commence déjà à péricliter. Puis de 1950 à 1964 un industriel essaie de relancer l’affaire en vendant l’argile à plusieurs faïenceries de Gien et de Limoges…

L’activité cesse totalement en 1964 et un projet de relance en 1975 ne verra jamais le jour.

Pour ceux qui souhaitent plus d’informations sur les potiers locaux, je vous conseille la visite de la maison de la terre à Bosc-Roger en Roumois ouvert quelques week-end en période estivale.

 

En dehors du sujet sur la poterie il y a une « pierre tournante » non loin des étangs. Cette pierre est constituée de poudingue. Certaines meules étaient fabriquées avec ce type d’agglomérat.

La pierre tournante r

 

 

BIBLIOGRAPHIE :

Roy Nathalie. Un atelier de potiers du haut Moyen-Age (Forêt de La Londe - Seine-Maritime), état de la recherche. In: Revue archéologique de l'ouest, tome 10, 1993. pp. 123-128;

Nathalie Roy, « La Londe – La forêt de La Londe » [notice archéologique], ADLFI. Archéologie de la France - Informations [En ligne], Normandie, mis en ligne le 01 mars 2004, consulté le 15 décembre 2020.

URL : http://journals.openedition.org/adlfi/12307

Les résumés des fouilles de 1988 à 1993 édités sur Persée par Nathalie Roy.

Document « à la découverte de la trame verte pays d’Elbeuf Orival. La Londe »

Guilluy Françoise. Les potiers d'Infreville (Eure). Débuts d'enquête. In: Annales de Normandie, 32année, n°3, 1982. Études sur le patrimoine industriel en Normandie. pp. 299-307

La Londe-Rouvray, une forêt périurbaine riche en histoire et en biodiversité (onf.fr)

Maison de la terre à Bosc Roger en Roumois

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