Une guerre maintenant oubliée qui, à l’époque , a été très mal vécue dans les communes aux alentours de la forêt la Londe Rouvray.
En Juillet 1870, la France a déclaré la guerre à la Prusse (qui deviendra l’Allemagne) .
Les prussiens (que je nommerai Allemands dans la suite du texte même si l’empire allemand n'a été déclaré que le 18 Janvier 1871) entrent dans Rouen le 5 décembre sans réel combat.
Le 6 ils prennent possession de Grand Couronne et de Oissel. Ils s’installent sur la rive gauche et font des incursions jusqu’à Bourgtheroulde, Elbeuf , La Bouille.
Le 21 Décembre ils évacuent Bourgtheroulde et se replient sur Grand Couronne et Orival avec comme base arrière Oissel.
Le 24 Décembre l’armée allemande détruit les ponts d’Elbeuf et sous les tirs des mobiles français, ils arrivent à faire sauter le pont ferroviaire d’Orival le 31 décembre.
Dès le 28 décembre, les troupes françaises commandées par le Général Roy (qui ne laissera pas un excellent souvenir ) lancent une contre-offensive.
Les troupes françaises étaient constituées de régiments de mobiles (fantassins mobilisés de l’époque) venant d’Ardèche, des Landes et de l’Eure. Il y avait aussi des compagnies de francs-tireurs ( des volontaires qui s’arment et que l’on regroupent) venant de Louviers, d’Elbeuf, de Caen, du Calvados, de Seine et Oise, de Charente maritime, du Puy de Dôme…
Les combats se passent en forêt de la Londe et Orival le 28, à Moulineaux le 30 au Château Robert le Diable le 30 et 31.
Une stèle rappelle la mort du Lieutenant Conrad Bochard le 30 Décembre pendant la prise du château par les français.
Monument au pied du château Robert le Diable.
Le 31 décembre ,les troupes allemandes reculent et se replient par le Petit Essart derrière une ligne défensive commencée par les Français et améliorée par les Allemands. Ils attendent les renforts qui viendront d’Amiens et du Pays de Caux.
Mais dès les premières heures du 04 janvier, les allemands lancent une offensive massive de, peut-être, 25000 hommes. A la faveur de la nuit et du brouillard ils reprennent Moulineaux et le château Robert le Diable où les combats sont au corps à corps. Seulement 500 français gardaient la position du château.
Les troupes françaises sont beaucoup moins nombreuses (environ 10000 hommes ) et mal équipées. De plus, cet hiver est particulièrement rigoureux ; les températures sont de -15°C , la Seine gèle ; difficile de bivouaquer en pleine forêt dans ces conditions.
Les troupes allemandes reprennent aussi la Maison Brulée.
Parallèlement une colonne allemande reprend Bourgtheroulde et une autre la Londe.
Plan de l’offensive allemande du 04/01/1871 (voir album photo pour plus de précision)
Les troupes françaises, malgré des luttes souvent farouches, sont obligées de se replier au bout de quelques jours en direction de l’Orne.
Etonnement il reste un témoignage de cette bataille en pleine forêt. GPS : 49,33374N / 0,96587E.
Il s’agit d’une tombe d’un mobile des Landes qui a été retrouvé mort le 05 janvier comme l’indique un acte de décès de Moulineaux.
Jean Baptiste Lavigne (et nom Delavigne comme indiqué sur la tombe) avait 25 ans quand il est tombé lors de la bataille du château Robert le Diable (né le 25 Mars 1845 à Gousse dans les Landes). Il avait dit à ses camarades qu’il voulait être enterré là où il tomberait s’il devait mourir au combat.
Il a donc été enterré par 2 hommes dont le garde barrière d’Orival à l’endroit même où ils ont découverts le corps le 05 Janvier . Il semble aussi que sa tombe ait dû être déplacée lors des travaux des viaducs ferroviaires. Ainsi depuis cette date des retraités de la SNCF l’ entretiennent . Ce qui nous permet encore de la voir actuellement.
Le 28 Janvier l’armistice a été signé à Versailles mettant fin aux combats entre les Français et les Allemands.
Ce conflit perdu a été très mal perçu par la population locale et nationale de l’époque.
Dès 1873 un monument a été construit à la Maison Brulée en mémoire des soldats tombés dans les environs.
Monument du mobile à la Maison brulée
Un article de l’hebdomadaire « le monde illustré » (28 Juin 1873) dont est tirée la gravure ci-dessous indique qu’une foule de trente mille personnes était présente lors de l’inauguration du monument le 18 Juin 1873.
Des sommités militaires, religieuses et politiques participaient à cette cérémonie d’ampleur nationale.
Vingt-deux soldats seraient enterrés en ce lieu et sur le monument une centaine de noms ont été gravés sur des plaques de marbre par ordre alphabétique.
Il y a eu quelques ajouts par la suite dont le mobile Lavigne dont la tombe est en pleine forêt..(bizarrerie de l’histoire : d’après le livre Souvenirs de l'occupation allemande de E.Turgis édité en 1874, son nom n’y était pas gravé à cette date).
Comme le montre les deux cartes postales ci-dessous, des fêtes commémoratives étaient organisées au pied du monument.
Un autre monument à l’initiative de la commune de Moulineaux a été édifié en 1901 au pied du château Robert le Diable pour commémorer les combats en ce lieu.
Il s’agit du monument appelé le Qui vive et des plaques ont été rajoutées ultérieurement commémorant aussi le conflit de 1914/1918 et 1939/1945.
Le monument appelé « Qui Vive »
Situation : Au pied du château Robert le Diable, GPS : 49,33891N / 0,9618462E
Tout en haut du cimetière de l’église St Georges à Orival se trouve encore une tombe de soldats allemands entourée d’une grille. Des soldats prussiens morts dans la bataille autour de la Londe y ont été enterrés.
Cette page est un bref résumé des événements de cette guerre . Pour ceux qui veulent en savoir plus des érudits locaux ont écrit des livres ou des articles beaucoup plus détaillés sur le sujet.
Edouard Turgis : Souvenirs de l’occupation allemande
Georges Dubosc : La guerre de 1870-1871 en Normandie
Pascal Creoff : Grand Couronne dans la guerre de 1870-1871
Henri St Denis : La londe et son marquisat.
Jean Pierre Chaline : Il y a 150 ans, une guerre oubliée ? 1870-1871
Georges Merlier et d’autres : La guerre de 1870-1871 en Haute Normandie.
Et d’autres ….
ARCHIVES :
Souvenirs de l’occupation allemande de E.Turgis édité en 1874
Le monde illustré 1873.
Bulletin de la société historique d’Elbeuf N°74
Archives départementales de Seine Maritime.
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